Raison d’être et récit de marque : du pareil au même ? 

Interview réalisée par Maeva Melano-Costamagna, Directrice Éditoriale (Ultramedia)

Plus d’authenticité, de transparence, de créativité… Les entreprises sont invitées à se raconter sans se la raconter. L’exercice du récit de marque se complexifie. Cyndie Bettant, directrice marketing et Influence chez Cision France, nous éclaire.

Raison d’être ou récit de marque : est-ce qu’on parle de la même chose ? Ces deux notions se nourrissent-elles l’une l’autre ? 

Il y a clairement un lien fort. Le récit, c’est ce qui fait vivre la raison d’être, ce qui la rend perceptible et crédible. La raison d’être est une fondation, une colonne vertébrale qui ne change jamais et sur laquelle s’appuie le récit qui lui s’adapte aux évolutions sociétales. La société n’a pas envie d’entendre aujourd’hui les mêmes discours que ceux prononcés dans les années 80 par exemple. Le récit de marque doit évoluer, au contraire de la raison d’être qui est fixe. 

Pourquoi parle-t-on aujourd’hui de besoin d’incarnation de ce récit ?

Avoir le bon récit de marque ne suffit pas. Encore faut-il savoir le rendre visible et audible dans un contexte saturé. Incarner, c’est apporter des éléments de preuve pour rendre le discours tangible. Dans ce contexte de défiance généralisée, la confiance envers le gouvernement, les institutions, les marques, se fragilise, tout est remis en question. 
Incarner son récit par des femmes et des hommes apporte une confiance et une proximité dont ont besoin les marques aujourd’hui pour être audibles et crédibles. 
Cela peut passer par des PDG charismatiques tels que Michel-Edouard Leclerc ou Yvon Chouinard chez Patagonia. Cela passe aussi par les collaborateurs, les influenceurs, les consommateurs. De l’humain, encore de l’humain, et toujours de l’humain ! Avec l’essor de l’IA, cela deviendra d’autant plus différenciant d’arriver à être incarné dans le futur. 

Dans la pratique, quels sont les ingrédients indispensables pour  une incarnation réussie ? 

Il faut savoir écouter toutes les parties prenantes en interne, mais aussi écouter les conversations des consommateurs sur les réseaux sociaux et s’ouvrir à des idées repérées ailleurs. Et surtout, il faut pouvoir apporter des preuves de ce que l’on assène ! J’aime beaucoup l’exemple de Volvo. Depuis longtemps, ils ont décidé d’axer leur stratégie de communication sur la sécurité. Ils se sont rendu compte que c’était leur point fort (ils ont été les inventeurs de la ceinture de sécurité à trois points et ont libéré le brevet pour que d’autres s’en servent). Dans leur récit de marque, cet aspect sécurité est prouvé. Il y a moins de deux ans, ils étaient les premiers à faire des crash-tests de leur voiture avec des mannequins taille femme. Maintenant, ils s’engagent à protéger les gens (et l’environnement) à travers des voitures moins consommatrices. Le récit évolue avec la société, mais toujours avec des preuves associées. Je crois beaucoup en l’action avant la communication. 

Peux-tu nous donner en une phrase, l’erreur à éviter à tout prix ?

Attention à ne pas se rattacher à toutes les modes et à tous les combats ! 

Quelles sont les marques qui, selon toi, sortent du lot ?

Deux me viennent à l’esprit. La campagne de communication de Bescherelle en 2023. Vous savez ce petit cahier rouge qui nous apprenait la grammaire ? La marque a surfé sur l’avènement de l’IA en disant : IA ou pas, apprenez à écrire correctement, car, selon comment vous écrivez votre script, vous n’obtiendrez pas le même résultat. À découvrir ici :  https://lareclame.fr/brainsonic-bescherelle-ia-orthographe-syntaxe-273081
La deuxième, c’est DOVE. La marque s’est attaquée à un sujet majeur : la santé mentale des jeunes filles, fragilisée par les réseaux sociaux et les multiples filtres pour « lisser » leur apparence. Elle est légitime, car Dove s’est toujours intéressée au bien-être des femmes. Elle attaque avec force ce sujet qui empoisonne la vie de nos enfants. 
À retrouver ici : 
https://www.thedrum.com/news/2023/06/21/inside-dove-s-mission-combat-the-negative-effects-beauty-filters
   

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