Les influenceurs BtoB, ces nouveaux maîtres à penser

Par Jeanne Camuset, Directrice conseil (Ultramedia)

Ils sont partout dans votre fil d’actualité. Ils génèrent des milliers de likes et de commentaires. Leurs publications inspirent et guident les pratiques professionnelles de communautés entières. En parallèle du marché de l’influence BtoC – déjà saturé – émerge un nouveau secteur : l’influence BtoB. Qui sont ses nouveaux maîtres à penser ? A quoi tient leur influence ? 
 
Certains influenceurs BtoB arrivent en tête des classements des personnalités à suivre sur les réseaux sociaux mais comment devient-on influenceur BtoB ? Trois grandes caractéristiques permettent de les reconnaître. Tout d’abord, un influenceur BtoB est un prescripteur, un leader d’opinion qui possède une capacité à générer un dialogue avec une communauté conséquente et la pousser à changer de vue sur une problématique ou un enjeu économique. Deuxièmement, son expertise est légitime, reconnue par une audience qui lui a accordé sa confiance. Enfin, l’influenceur BtoB est plébiscité sur des réseaux sociaux professionnels qui ne connaissent pas la crise. 83,6 % exercent sur Twitter, 77 % sur LinkedIn et seulement 30% sur Instagram. Une fois cette définition posée, il est légitime de se demander ce qui déclenche l’envie de suivre le compte d’un influenceur, ce qu’apportent concrètement ces influenceurs dans les pratiques professionnelles et surtout ce que cela dit de notre soif d’information professionnelle.

Des influenceurs in real life 
Les motivations sont diverses. Les « followers » vont se fier à un expert pour se tenir informés des tendances actuelles et futures dans leur secteur d’activité, pour se nourrir de bonnes pratiques, découvrir une vision inspirante, pour entendre des prises de position qui sortent du cadre parfois trop rangé de leur entreprise.
Reconnus pour leur capacité à proposer du contenu qualifié, les influenceurs BtoB se déploient aussi hors des réseaux sociaux. Ils tiennent un blog, rédigent des livres blancs, multiplient les interviews vidéos et acceptent volontiers des invitations à des podcasts. S’ils mettent un point d’honneur à ne pas monétiser leurs contenus et à les diffuser de la façon la plus large possible, ils répondent en réalité à une stratégie « win win ». Lorsqu’un influenceur BtoB est invité à un live ou une table ronde, il en fait la promotion sur son compte et en avise sa communauté. Il gagne ainsi en visibilité et en audience. 
Mais dans le vaste monde de l’influence, une catégorie d’experts domine le jeu : les dirigeants puissants qui s’adressent à leur communauté en un Tweet et publient sur Linkedin avec l’aisance d’un adolescent. Prenez Michel Edouard Leclerc. Le PDG du groupe de grande distribution effectue un va-et-vient perpétuel entre les plateaux télé et son compte Twitter. Il peut se prononcer sur l’augmentation du coût de la vie en un post comme dans une interview sur BFM TV. C’est ce qui différencie les micro- des macro-influenceurs BtoB. La communauté de ces derniers flirte avec les 100 000 abonnés, leurs publications atteignent des taux d’engagement historiques et ils tutoient les patrons du CAC 40 : ce sont eux les leaders incontestés du secteur !

Une ligne de dialogue directe
Car un macro-influenceur BtoB dispose d’un ensemble de voies de communication pour adresser toutes ses cibles en simultané : actionnaires, partenaires, collaborateurs, etc. et ainsi renforcer le sentiment de proximité avec chacune d’elles. Il peut faire passer ses messages de dirigeant, valoriser son groupe, partager les dernières innovations maison, rappeler et faire vivre sa vision stratégique. L’influence BtoB est un outil de communication complémentaire des médias classiques et un atout déterminant pour celles et ceux qui maîtrisent les codes du dialogue direct. Pendant le Covid, on a ainsi vu Stéphane Richard (Orange) répondre aux questions d’un YouTubeur depuis son appartement ou Philippe Brassac (Crédit Agricole) réaliser des vidéos avec son iPad dans son bureau. Pour endosser la posture d’influenceur, il faut accepter de tomber la cravate et de moins contrôler son image car c’est précisément ce qui plaît aux followers : l’aspect informel. Les réseaux sociaux permettent en quelque sorte de pénétrer dans les coulisses et de favoriser l’interaction.
Mais attention, l’enjeu d’authenticité est central mais non sans risque. Plus son audience grandit, plus on s’expose à un scénario que tout influenceur craint : le soulèvement soudain et imprévisible de sa communauté pour un propos jugé inapproprié. S’ils prennent de l’ampleur, ces mouvements de contestation provoquent la convocation immédiate de cellules de communication de crise pour éteindre les départs de feux. Voilà pourquoi l’influenceur BtoB n’a pas le droit à l’erreur. C’est la communauté qui fait l’influenceur et qui juge de la pertinence de son propos. La plupart l’ont bien compris. Ils doivent donc s’astreindre à des règles implicites : proposer une hauteur de vue stratégique et singulière et adopter une expression personnelle et sincère s’ils veulent rester au coeur du débat.

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